Le Chamane KreVeTTe

/HRP: bien que n'étant pas Blakhole, je me permets de vous faire partager mon RP/

Depuis sa plus tendre enfance, Ulugunu avait été élevé dans le chamanisme. Il avait d'abord choisi le Totem Aigle, trompé par ses illusions d'enfant. Car si l'aigle est un animal majestueux, puissant, beau, à la vue perçante et aux griffes acérées, il n'en est pas moins très con. Il est donc très difficile d'obtenir de l'Esprit de l'Aigle une aide appropriée.
En fait, les rares fois où le jeune chamane parvenait à invoquer l'esprit de l'aigle, celui-ci s'en allait au loin chasser la marmotte. Le Roi Theo, le père d'Ulugunu, désespérait de voir un jour son fils gagner le respect de ses pairs. Les filles de son âge riaient de lui, et toutes repoussaient ses avances. Quant aux garçons, ils ne manquaient pas une occasion de le maltraiter ou de le ridiculiser.
Calaguntu, un jeune chamane de l'Ours, lui volait tous les jours son dessert à la cantine de l'école chamanique. Parfois même il renversait volontairement son plateau. Sheban, chamane du serpent et expert en potions diverses, avait pendant toute une semaine ajouté à sa nourriture une potion vomitive fulgurante. Heureusement pour Ulugunu, Calaguntu l'avait forcé à arrêter après qu'il eût volé la purée du malheureux. Un jour, un chamane du Pingouin dont le nom fut oublié, avait tiré à terre les pantalons d'Ulugunu en plein milieu d'une classe, ce qui lui avait valu le surnom humiliant d'Ulu-cul-nu.
Et ces brimades étaient quotidiennes, et Ulugunu était partagé entre la rage muette et le désespoir. Et les rares fois où sa rage s'exprimait, elle laissait bien vite place au désespoir, après qu'il eût été à nouveau humilié. Bien souvent, au milieu de la nuit, Ulugunu partait en forêt, et là, durant de longues heures, il pleurait.
Il se lamentait à voix haute, s'adressant en ces termes à l'esprit de l'aigle:
Pourquoi, mon ami? Pourquoi ne m'aides-tu jamais à vaincre mes ennemis?
Même le chamane du phoque est mieux loti que moi. Je t'ai pourtant fait
de nombreux sacrifices. Tu t'es même délecté de mon hamster favori.
As-tu trop faim que tu partes ainsi chasser au moment même où j'ai besoin
de toi?

Bienvenue à toi, Ulugunu.
Cesse de pleurer... Il n'y a pas que chez les chamanes qu'on pleure, tu sais.
Le monde est cruel.

C'est facile a dire quand on est bourré

Preuve :

Toietmoi ramene toi et parle ...!!

.:°° ulugunu :;^ °°
gnu gnu!

Citation :

Un jour, un chamane du Pingouin dont le nom fut oublié, avait tiré à terre les pantalons d'Ulugunu en plein milieu d'une classe, ce qui lui avait valu le surnom humiliant d'Ulu-cul-nu.

Je pense que cela vient de là.

Mais ses questions restaient sans réponse, et les autres enfants continuaient à le considérer comme le plus faible d'entre eux, et à ce titre lui en faisaient voir de toutes les couleurs. Les années passèrent ainsi, jusqu'à ce qu'Ulugunu approche de sa quinzième année.
Là, un soir qu'il pleurait comme à son habitude dans la forêt, une Dryade le prit en pitié et vint le voir.
Ulugunu, pourquoi viens-tu pleurer dans ma forêt tous les soirs depuis des années? Souffres-tu d'un problème insurmontable?
Ulugunu, qui avait soudain honte de sa propre attitude, décida de mentir:
Ma bien aimée est morte en portant mon enfant, jamais le flot de mes larmes ne se tarira.
Et il pleura de plus belle.
Ulugunu, ne crois pas que je suis aussi stupide que ton totem. Tu sais, chaque soir ou tu viens ici, je m'approche discrètement, et je pleure en silence avec toi. Et comme tu as l'habitude de parler à voix haute, je sais beaucoup de choses sur toi.
Ulugunu cessa de pleurer, et prit un ton agressif, blessé que quelqu'un l'ait observé dans ses pires moments de détresse:
Alors pourquoi me poser cette question, si tu sais pourquoi je pleure? Et d'abord, qui es-tu?
Les hommes me nomment Jasmin, je suis une dryade. Ta tristesse m'émeut, et je voulais que tu saches que tu pouvais me confier tes problèmes. Jamais je ne rierai de toi, jamais je ne te mépriserai, et jamais je ne te ferai de mal.
Ulugunu se redressa, et dit:
Si tu savais combien de filles m'ont dit cela avant de me faire tomber dans les latrines ou de couper la queue de mon hamster ... Je ne me fais plus avoir de cette manière depuis longtemps.
Alors la Dryade prit délicatement la tête d'Ulugunu dans ses mains et déposa sur ses lèvres un baiser plus doux que le meilleur des miels. Peu coutumier des choses de l'amour, Ulugunu paniqua et partit en courant.

/HRP: j'ai récupéré internet, donc je risque de moins vous faire languir, maintenant./

Après cela, Ulugunu ne retourna pas dans la forêt pendant trois semaines. Mais comme il ne donnait plus libre cours à son désespoir, la rage qui était en lui devenait de plus en plus forte. Jusqu'au jour où elle explosa. Ce fut Calaguntu qui en fit les frais. Ce jour là, au lieu de simplement prendre son habituel dessert, il plongea la tête du chamane-aigle dans son assiette de purée, avant de le projeter au sol. Comme tout le monde riait, ils n'entendirent pas le grognement qu'émettait le garçon au sol. Bientôt, le grognement se transforma en grondement. Le corps d'Ulugunu tremblait d'une rage indicible. Il se releva très lentement. Calaguntu tenta de le maintenir au sol en écrasant son dos de son pied:
Reste à terre, chien galeux!
Un autre garçon intervint:
Eh, n'insulte pas mon totem, Cala!
Et les enfants rièrent de plus belle. Seulement ils n'avaient pas remarqué qu'Ulugunu n'avait pas plié sous le poids du Chamane-Ours. Au contraire, il continuait à lentement se relever, comme s'il n'était même pas gêné. Lorsqu'il fut debout, il se tourna vers celui qu'il considérait à présent comme son ennemi mortel. Ses yeux étaient devenus rouges et brillaient du feu de la haine. Son visage arborait un sourire carnassier. Plus personne ne riait certains commençaient à sentir poindre la peur. Tout à coup, Ulugunu bondit en avant en hurlant. Ses ongles s'enfoncèrent profondément dans les épaules de son adversaire, tandis qu'il mordait sa joue.
Calaguntu tentait d'articuler un appel à l'aide, lorsque la chair céda sous la pression des dents. L'enragé lui cracha son morceau de visage ensanglanté à la figure. Il bondit en arrière, et tandis l'adolescent défiguré qui se tenait en face de lui hurlait de douleur et de terreur en bouchant le trou de sa joue avec ses mains, il dit:
Tu cries comme une fillete!
Et repartit à l'assaut. D'un coup de tête, il projeta sa victime contre une table et commença à cogner la tête ensanglantée contre la table à plusieurs reprises.
Plusieurs enfants avaient fui, d'autres vomissaient, certains étaient pétrifiés par ce spectacle d'une violence inouie.
Soudain, une forme féline sortie de nulle part arracha Ulugunu à sa proie. C'était le totem du roi Theo, un somptueux léopard. La voix du roi, retentit, venue du ciel.
Ulugunu, aujourd'hui tu emplis mon coeur de fierté et de honte à la fois. Enfin tu révèles au monde la force que je savais être en toi. Mais pour quoi faire? Si je n'étais pas intervenu, tu aurais tué ton ami!
Ulugunu cracha à terre en direction de la forme ensanglantée qui gisait à terre:
Ca mon ami! Jamais! Mais puisque mon propre père est de son côté, je préfère quitter la classe chamanique et trouver ma voie par moi-même.
Et il s'en fut dans la forêt.

J'adore, j'attend la suite avec impatience même si elle ne vient pas tout de suite...

Il alla à l'endroit où il avait l'habitude de pleurer, et appela Jasmin. La dryade arriva sans un bruit, seul son doux parfum trahissait sa présence.
Mon petit Ulugunu, enfin te revoilà. J'avais peur de ne plus te revoir. Es-tu enfin décidé à te confier à moi?
Dès qu'il posa les yeux sur elle, sa fureur disparut. Mais on ne détruit pas en quelques instants des barrières qu'il a fallu quinze années pour construire.
Non. Mais j'ai faim. J'ai ... J'ai fait de l'exercice, tout à l'heure.
La dryade était à la fois déçue et étonnée. Le jeune chamane semblait avoir tellement changé, en ces quelques semaines où il n'était plus venu. Elle l'invita à la suivre, et ils s'enfoncèrent plus profondément dans la forêt. Ils arrivèrent à une sorte de grande cabane dont les murs étaient des massifs des plus belles fleurs qu'Ulugunu ait jamais vues. Et leur beauté n'avait d'égale que leur parfum ennivrant. Deux heures durant, Ulugunu engloutit les baies que lui apportait Jasmin. Son appétit semblait insatiable. Mais quand la dryade revint pour la septième fois, les bras chargés de fruits en tous genres, le jeune garçon s'était endormi, toujours assis à la table. Elle parvint à l'allonger sur un parterre de mousse sans le réveiller.
Il dormit deux jours durant. Mais au matin du troisième jour, il commença à s'agiter dans son sommeil. Puis d'un coup, il se réveilla en hurlant. Mais ce n'était pas le cri d'un enfant apeuré réveillé par un cauchemar. A l'évidence, la rage qui avait si longtemps sommeillé en lui n'avait pas disparu avec son combat. Jasmin était affolée. Le chamane semblait étranger à lui-même.
Ulugunu, qu'y a-t-il?

Il la regarda de ses yeux à nouveau rouges. Et cette fois encore, la rage retomba.
Ulugunu, tu dois me parler. L'esprit de la colère tente de prendre le contrôle de ton être!
Il hésita.
Et ... C'est grave?
Oui. Tu dois absolument vaincre l'esprit de la colère, sinon ton âme disparaîtra à jamais de ce monde.
Méfiant, il demanda:
Tu n'essaies pas de me rouler, Dryade?
Je te l'ai dit, jamais je ne te voudrai du mal.
Sceptique, il demanda:
Alors pourquoi veux-tu que je chasse cet esprit qui pour la première fois m'a défendu contre ceux qui me brimaient? N'est-ce pas là me vouloir du mal?
Que dis-tu? Grands Dieux, qu'as-tu fait, mon cher Ulugunu?
Ce que j'ai fait?
Il rit à gorge déployée.
J'ai arraché la joue du plus fort des élèves de la classe chamanique! Et ce grâce à la puissance de ce que tu appelles esprit de la colère.
Tu te trompes. Tu n'as pas vaincu ton ennemi en puisant la force de l'esprit de la colère. C'est l'esprit de la colère qui a vaincu son ennemi en puisant ta force. Pourquoi crois-tu que tu aies dormi pendant deux jours entiers?
J'ai faim.
Et la dryade, pour le moins serviable, repartit chercher des fruits. Lorsqu'elle revint, Ulugunu pleurait à chaudes larmes.
Je ... Je ne voulais pas, lui faire ça. Mais c'était plus fort que moi! Il a été tellement méchant avec moi. Il n'y a pas eu un jour où j'ai été tranquille, lui et les autres se moquaient de moi sans arrêt, ils me frappaient, m'humiliaient, volaient mes repas ...
Mon pauvre Ulugunu, ta vie a dû être bien triste.
Elle le prit dans ses bras. Ulugunu, à qui ce contact était loin de déplaire entreprit alors de lui raconter avec force détails toutes les brimades qu'il avait dû subir à l'école chamanique.
Cela dura jusqu'au crépuscule. Quand il n'eut plus rien à raconter, Ulugunu sécha ses larmes, s'écarta de la dryade, la regarda dans les yeux et dit:
Je vais vaincre l'esprit de la colère. Montre-moi comment faire, s'il te plaît.
Je te préviens, ce ne sera pas facile. Tu souffriras. Tu douteras. Tu auras peur.
Je m'en moque, j'y arriverai. Car je veux être moi-même afin de profiter de chaque instant à tes côtés.
La dryade essuya une larme. Jamais on ne lui avait dit quelque chose d'aussi beau. En fait, jamais on ne lui avait dit quoi que ce soit. Les dryades naissent d'elles-même, et vivent en solitaires dans les forêts, aussi Ulugunu était-il le premier à s'adresser à Jasmin.
Tu es triste? J'ai dit quelque chose de mal?
Demanda Ulugunu pour qui les larmes étaient sinonymes de tristesse et de douleur.
Non, bien au contraire. Ce que tu viens de me dire emplit mon coeur de bonheur.

A nouveau elle le prit dans ses bras, et le serra très fort. Ulugunu était content, il semblait qu'il ait trouvé un nouveau moyen pour atterrir dans les bras de Jasmin. Encore qu'il n'était pas très sûr de savoir comment emplir à nouveau son coeur de bonheur. Mais il trouverait bien. Cette nuit là, ils dormirent tous deux dans la cabane, serrés l'un contre l'autre.
Dors bien, mon ami, demain sera sûrement la journée la plus dure de ta vie.
Mais il ne l'entendit pas, car il dormait déjà, blotti contre elle.
Le lendemain matin, quand il se réveilla, le magnifique regard d'émeraude de la dryade était plongé dans le sien, comme si elle essayait de voir son âme. Ils restèrent ainsi un moment, puis le chamane se dégagea d'elle doucement, obligé d'y mettre toute sa volonté.
Alors, es-tu prêt à affronter l'esprit de la colère?
Plus que jamais.
Elle sortit alors une petite fiole de bois, close par un bouchon de cire.
Tu dois boire tout le contenu de cette fiole. Tu basculeras alors dans le monde des esprits. Tu devras alors trouver l'esprit de la colère, et lui dire de partir.
C'est tout? Ah, les femmes, vous faites des drames à partir de rien!
Il lui arracha la fiole des mains, fit sauter le sceau, et la renversa entièrement au fond de sa gorge.
Erk, mais c'est dégueulasse!
Courage, Ulugunu, et reviens-moi sain et sauf.
Mais il n'avait pas entendu la fin de sa phrase. Il avait l'impression que ses yeux, son ventre, ses mollets, ses oreilles allaient exploser. La douleur laissa bientôt place à la peur; que dis-je, la terreur. Il était en train d'aspirer le monde. Et il savait bien que le monde ne rentrerait pas entier en lui. Il hurla. Mais son corps aspira aussitôt son hurlement. La lumière. Fausse, trop intense, trop blanche. Le bruit. Faux, trop violent, trop puissant. Le chaos l'entourait, et il entourait le chaos. Finalement, son corps s'aspira lui-même, et s'en fut fini. Plus de lumière. Plus de bruit. Il ne faisait pas chaud. Il ne faisait pas froid.
Il essaya de bouger. C'est alors qu'il comprit qu'il n'existait plus. La terreur revint. Peut-être n'avait-il jamais existé. Alors ce n'était pas grave de continuer à ne pas exister. Cela devenait même agréable. Ne pas
avoir à porter le poids de son corps. Ne pas avoir à porter le poids de ses souvenirs. Ne pas avoir à porter le poids de son âme. Pourtant, il portait quelque chose. Non. Il portait quelqu'un. Et ce n'était pas agréable.
Mais que pouvait-il donc porter? Rien n'existait. Ou bien s'était-il trompé? Peut-être que le monde n'avait pas disparu. Peut-être que lui-même n'avait pas disparu. Peut-être que seule son interaction avec le monde avait disparu.